Surdité, communication et "Langage" 1

Publié le par Jaz

A la base de notre travail

A la base de notre travail

LSF & ÉNONCIATION

Une nouvelle aventure s'annonce. Je reçois une lettre qui me renvoie à mes activités d'enseignante, où sont donc passés mes cours aux étudiants ? et à mes propres questionnements du temps où j'exerçais avec les enfants. Ce blog était celui des coups de coeur au départ, et c'en est bien un nouveau.

Avant propos

Emmy présente une surdité profonde, non appareillable. Elle a été oralisée dès la naissance en milieu entendant, ayant découvert la LSF (langue des Signes Française) au collège seulement. Elle est parfaitement bilingue. Elle s'exprime oralement parfaitement (assourdissement des occlusives avec un débit un peu rapide pour une vieille dame peut-être).

Extraits de sa lettre

"... j'ai étudié la philo 2 ans et j'ai décidé d'arrêter car je n'avais pas les bons moyens de suivre les cours, je manquais trop d'informations puisque je n'avais pas d'interprète et peu de preneurs de notes... la philo est une matière où l'on débattait énormément... j'étais privée de tout cela...

Donc j'ai entamé des études d'éducatrice spécialisée..."

(maternité, décès d'un enfant, pratique plusieurs années d'éducateur, handicaps de tout bord, étrangers, en insertion etc... plus d'intérêt pour rien, elle réalise que sa vie ne lui correspond plus).

" ... j'ai un réel besoin de travailler avec mon monde des sourds et la LSF. J'ai donc décidé de me lancer pour préparer un "MASTER MEEF 2e degré LSF" voire un doctorat : travailler dans la recherche des langues des signes.

J'aime étudier, analyser, comparer et comprendre la LSF et d'autres langues des signes des autres pays... "

Emmy vient me voir pour être aidée à mieux comprendre l'aide que l'Université peut lui apporter. Elle connait mes différentes casquettes :

- prof de linguistique

- orthophoniste : lecture sur les lèvres plus facile

- et possible "tuteur" de sa rédaction car abandon depuis plus de 10 ans de l'écriture, manque de confiance etc...

- disponibilité éventuelle.

Et Emmy poursuit en exposant la problématique d'un sujet éventuel qui m'appelle en quelque sorte ! Je suis tout à fait d'accord. Le résultat de cette première rencontre est le tableau qui s'affiche en tête d'article. La numérotation indiquera dans un autre article l'ordre dans lequel nous avons abordé ces notions. Il y sera commenté  sur l'autre blog. Celui-ci présente la problématique qu'elle a proposée, support de mes explications.

Problématique

Suite de sa lettre :

  • " La langue française : nous avons une syntaxe 

sujet / verbe / complément

En LSL la syntaxe est différente :

temps / lieu / sujet / action

Je m'intéresse aux pronoms démonstratifs et propres. En LSF on n'a pas de signe qui permet de savoir si c'est un 

je / tu / il / elle

nous / vous / ils / elles

comme pour       le / la / les     me / se / te      du / de

Tout se fait seulement en pointage du doigt. C'est trop généralisé et ça pénalise énormément les jeunes sourds, au niveau de l'écrit, qui ne savent pas si c'est masculin ou féminin et se trompent systématiquement.

Donc comment enseigner les jeunes en respectant la syntaxe de la LSF ainsi que la syntaxe française écrite.

  • Les mots abstraits

Comment traduire les mots abstraits car les sourds ont un sens très développé sur le visuel et le concret. 

On dit que la LSF est en 4D... "

 

DISCUSSION
Pourquoi répondre à sa demande et comment m'y prendre ?

Je me retrouve en terrain familier. Comme avec les enfants en difficulté avec le langage, il n'y a pas que les sourd qui rencontrent ces problèmes !!! Et il faut toujours aller les chercher là où ils sont.

Elle ignore tout de l'énonciation, initiée à l'écrit par une orthophoniste qui, heureusement pour moi, pratiquait la méthode Borel.
Je vais donc, après avoir différencié l'oral de l'écrit, me centrer sur l'oral et préciser l'existence d'une communication non verbale sur le corpus même de notre discussion et de nos échanges verbaux pour qu'elle en repère la dimension gestuelle, afin de mieux différencier les signes des deux langues. Cela nous a pris du temps car ce n'était pas un cours mais une analyse sur le vif.

Le triangle dialogique (ajouté au tableau un peu plus tard) sera une première explication qui lui permettra de comprendre la différence entre une situation d'écrit et de communication en LSF, à la base de la compréhension des difficultés qu'elle avait signalées dans sa problématique.
Je ne lui ai pas parlé de la double articulation du signe ! Nous n'en sommes pas aux débats théoriques.
La suite bientôt dans le blog sos... 2

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